Le journal de bord de Salomé Sieurac
« En voiture Simone », virée sur les routes du canton de Lapalisse
Classement des archives des routes vicinales des communes du sud-est du département de l’Allier, pour la période du XIXe siècle jusqu’en 1938
Nous avons quelques semaines pour classer les archives du service vicinal de l’arrondissement de Lapalisse, remontant au milieu du XIXe siècle. Alors, allons-y !
Semaine 1
Mais au fait, vicinal, qu’est-ce que c’est ?
Vicinal, vient du latin, qui signifie voisin ou voisinage. Ce terme est utilisé pour parler des petites voies de communication : les chemins et les routes entre les villages ou entre un village et ses hameaux.
Au XIXe se met en place une administration pour aménager et entretenir les routes. Dans les départements, le service vicinal est formellement créé en 1836. Ce service s’occupe des routes et chemins internes au département. La voirie vicinale est divisée entre les Chemins de Grande Communication qui relient plusieurs communes et les Chemins de Petite Communication ou Chemins Vicinaux Ordinaires qui ne dépassent pas les limites d’une commune, ce sont l’équivalent de nos actuelles routes communales.
Le service vicinal disparait en 1940, il est rassemblé avec le service des routes départementales pour ne former qu’un seul service de toutes les routes du département.
Maintenant que l’on en sait plus sur cette administration, nous pouvons commencer le classement !
Semaine 2
Devant nous, une quarantaine de boites archives, pleines de documents.
40 boites, quel boulot !
Pas de panique, dans les boites, les documents sont le plus souvent réunis en dossiers, rangés par commune et par route.
Mais alors, quel est le but de notre mission de classement ?
En un mot : organiser-tout-cela.
Le but du classement est de créer un instrument de recherche, une sorte de sommaire de tous les dossiers. L’objectif est que n’importe quel lecteur des archives puisse s’y retrouver. On va donc organiser du plus général au plus particulier.
Comment on s’y prend ?
On commence tout simplement par ouvrir la boite 1, décrire le 1er dossier : qui est le producteur des documents, le type de ces documents, leurs dates, de quoi parlent-ils… Puis c’est le moment de passer au dossier 2, 3, 4 etc... Et de faire de même avec les boites 2, 3, 4, 5…
Semaine 3
Justement, voyons plus en détail ce que contiennent ces boites…
Nous avons de la chance, nous retrouvons souvent les mêmes types de documents : pour chaque commune nous avons des dossiers de projets ou de construction de routes.
Nous découvrons :
- des plans de la route à construire ;
- des relevés du profil de la route ;
- des plans de l’ensemble des routes d’une commune.Commune de Jaligny, plan d’ensemble des chemins de la commune, 1936)
Mais surtout… beaucoup de documents concernant le projet de construction : cahier des charges, calculs préalables, liste des parcelles de terrains à acquérir pour faire passer la route, documents de suivi des travaux, des courriers…
La date des documents va de 1836 aux années 1970, mais nous ne nous occupons que des documents entre 1836 et 1940, c’est-à-dire la période d’existence du service vicinal.
Semaine 4
Les ouvrages d’art sont en principe des constructions d’importance permettant le franchissement d’obstacles, la protection vis-à-vis de l’action de la terre ou de l’eau ou la séparation de plusieurs moyens de transports.
Dans l’arrondissement de Lapalisse, nous ne rencontrons rien de monumental. Les ouvrages d’art sont plus simplement des petits ponts (ou ponceaux), des murs de soutènement, des trottoirs ou des aqueducs permettant le passage d’un petit cours d’eau sous la route…
Les plans, coupes et dessins sont pour cette époque faits à la main, sur papier ou sur calque. Précision et finesse d’exécution n’excluent pas de malheureux accidents…
Semaine 5
Une route vicinale n’est rien sans son cantonnier.
Ce n’est qu’au début du XXème siècle, avec l’apparition progressive des automobiles que les revêtements bitumés sont perfectionnés et utilisés sur l’ensemble des routes. Jusque dans les années 1920, les chemins vicinaux ne sont pas goudronnés.
Avant cette date, les voies sont faites d’un mélange de terre et graviers compressés. On y circule à pied, à cheval, à bicyclette ou en véhicule tracté par des animaux.
Ce type de route se dégrade vite lors d’intempéries ou à cause des passages fréquents. C’est pourquoi l’entretien des routes est une tâche capitale.
Les agents-voyers, sont les agents du département chargé de la création et de l’entretien du réseau vicinal. À la tête du service on trouve un agent-voyer en chef ou un ingénieur des Ponts-et-Chaussées. Il dirige une équipe d’agents-voyers de cantons qui préparent les projets, et encadrent les travaux. Tous sont aussi chargés de la police sur ces chemins, ils peuvent établir des contraventions en cas de dégradations volontaires.
Les cantonniers, souvent engagés par les communes, exécutent les travaux de construction et d’entretien. Pour l’entretien, ils sont souvent attachés à une zone ou à un chemin en particulier.
Semaine 6
En continuant l’exploration des boites d’archives nous tombons sur des dossiers traitant des voies de « chemin de fer d’intérêt local » …
Mais que font les chemins de fer au milieu des routes vicinales ?
Nous avons appris que le service vicinal, créé en 1836, est chargé des routes communales du département.
Dans le même temps, les Ponts-et-Chaussées affectent des ingénieurs dans chaque département pour s’occuper de la construction et de l’entretien des équipements : les ponts, les routes nationales et départementales, les canaux, les ports, la distribution et l’assainissement de l’eau et les chemins de fer.
En 1872, le département de l’Allier décide de fusionner le service vicinal et le service des routes des Ponts-et-Chaussées. Le service vicinal est désormais dirigé par des ingénieurs des Ponts-et-Chaussées. Hors, les ingénieurs chargés des routes s’occupent également des chemins de fer d’importance locale. C’est pourquoi nous retrouvons, aujourd’hui, dans le fonds du service vicinal, des documents relatifs aux voies ferrées. CQFD.
Semaine 7
Vous avez dit chemins de fer d’intérêt local ?
Au milieu du XIXe siècle, les lignes de chemin de fer se développent pour relier les grandes villes de France. Une fois ce réseau mis en place, les départements s’intéressent à l’installation de voies ayant un intérêt plus local.
L’installation d’une ligne d’intérêt local est décidée par le Conseil général. La ligne est concédée à une entreprise privée qui la construit et l’exploite. Ce sont des voies de bonne facture mais réalisées à l’économie : elles sont étroites (1 mètre environ), les pentes et les virages sont plus importants que pour les autres lignes, les passages à niveau sont seulement signalés par des panneaux et les gares sont de petites tailles.
Nos boites d’archives contiennent des dossiers sur trois de ces lignes, toutes exploitées par la Société générale des chemins de fer Economiques (S. E.) :
- la ligne de Dompierre-sur-Besbre à Lapalisse, mise en service en 1893 ;
- la ligne de Varennes-sur-Allier au Donjon, mise en service en 1906 puis poursuivie jusqu’à Digoin (Saône-et-Loire) en 1911 ;
- la ligne de Lapalisse au Mayet-de-Montagne, mise en service en 1906.
Ces lignes ont fonctionné, pour les voyageurs et les marchandises, jusqu’à leur fermeture en 1939.
Semaine 8
Quels types de documents avons-nous ?
Les archives que nous classons sont principalement de deux types pour les chemins de fer.
D’un côté, nous avons des documents sur la construction des lignes et des gares : des plans, des profils et des calculs établis par les ingénieurs.
Sont aussi présents les dossiers du service chargé du contrôle administratif des lignes et de la société exploitante. Il s’agit de registres consignant tous les incidents survenus sur les lignes ainsi que des rapports d’enquêtes concernant des accidents de personnes.
Animaux sur les voies, véhicules ou personnes percutées aux passages à niveau, pannes de matériels, registre des réclamations… autant de sujets consignés par le commissaire de surveillance en poste à Jaligny-sur-Besbre.